Steven Benoit est un tocard. Il n’a aucun discours qui peut susciter l’intérêt, provoquer la surprise ou la colère. Qu’il se soit retrouvé Premier ministre du Gouvernement de Montana semblait relever d’une logique implacable. Il y a très peu de politique qui accepterait de se retrouver dans cette aventure ridicule et sans avenir. C’était tout indiqué pour lui et l’inénarrable Fritz Jean qui, lui, a négocié tout le mois d’août une sortie de crise avec le Gouvernement et des diplomates étrangers, dans le dos de l’accord de Montana, pour finalement, au moment de signer, dire qu’on l’avait mal compris.
Steven Benoit est certainement plus honnête que la plupart de ceux qui évoluent sur l’échiquier politique. Il est même d’une naïveté qui le rend sympathique. Mais, curieusement, l’un des grands problèmes de l’ancien sénateur c’est cette propension à vouloir montrer qu’il est « le plus propre ». Benoit se pavane, au sens propre du terme, se décerne des satisfecit, se met en concurrence avec d’autres personnes, qui n’ont rien à voir avec lui. Il bavarde tellement que la seconde après l’avoir écouté on a tout oublié de ce qu’il vient de dire. Nous pensons que même lui ne se rappelle pas de propos qu’il vient de tenir. Il parle fort, il éructe, pour couvrir ses propres pensées. L’ex sénateur n’arrive même pas à avoir d’ennemis. Il indexe des gens lors de ses bouffonneries qui ne le prennent jamais au sérieux, ne lui répondent pas. Benoit aurait payé pour avoir des adversaires qui l’attaqueraient et à qui il répondrait. Mais, hélas ! Steven Benoit n’est que du bruit. Le genre de bruit banal, comme une chaise que l’on déplace, une porte qui claque. Rien qui fasse peur. Il a un vocabulaire de cour d’école « mesye pa fè lach », et des réflexions erratiques qui lui valent des moqueries sur les médias sociaux. Son « Faites en de même A H » dans le tweet où il publie sa lettre de démission révèle le très peu de prise qu’il a sur la réalité, comme si dans sa tête il y avait quelque comparaison entre le Premier ministre fictif qu’il est et demeure et le chef actuel du Gouvernement Ariel Henry.
Il faut avouer qu’il a de bonnes raisons de perdre l’esprit Steven Benoit. Avoir passé une année entière à jouer un rôle où l’absurde le disputait au comique, peut démolir un homme, dans un pays où la réalité est cruelle. Il n’est pas aidé par ses amis. Dans la réponse de Montana à sa lettre de démission, Benoit est désigné « M. le Premier ministre élu par l’accord du 30 aout ». Il s’agit certainement d’un renvoi d’ascenseur à l’ancien Sénateur qui avait twitté que « Le projet de Montana reste debout », comme pour s’autoflageller. C’est une véritable thérapie contre la tristesse de lire les commentaires que les internautes laissent sous les tweets de Benoit.
Steven Benoit a été Député puis Sénateur de la République. Avant, on le connaissait dans le monde de la nuit. Il organisait des bals, gérait des hôtels et des restaurants. Devenu beau-frère du Président Préval, il s’est lancé en politique. C’est presqu’une blague potache, mais nous n’avons jamais été à l’abri du malheur en Haïti. Pendant tout son mandat de Député il s’est acharné à faire comprendre dans les médias qu’il n’avait que des divergences avec le Président, même quand on ne lui demandait rien. Il a ambitionné la présidence de la République en 2010 pour finalement se retrouver Sénateur. Détesté par plusieurs de ses collègues sénateurs, pour de mauvaises raisons, fidèle à lui-même, Steven Benoit n’a pas pu se retenir d’aller dans les médias, avec sa voix qui hérisse, raconter « mwen gen 2 bèl pitit gason etc. ». Il aurait juste dû se taire. Il ne s’est pas représenté au Sénat en 2016 et a été très peu présent dans l’actualité pendant quelques temps. Il a essayé de s’accrocher à la branche Petrocaribe, cela n’a pas marché très fort.
Steven Benoit est une figure idéale du comique de situation. Il a été du pain béni pour Montana. Nous le plaignons, mais nous sourions quand même. Podyab Steven !
La Rédaction