Une campagne d’intimidation contre Emmelie Prophète

C’est Clarens Renois qui a lancé la balle. Il faut là lui reconnaitre un certain talent politique. La démission de la ministre casserait le Gouvernement et ferait bien l’affaire de l’opposition, absolument inaudible, en panne d’idées et d’alternatives. Il n’en fallait pas plus pour que s’engouffre dans la brèche un certain nombre de « morts » que l’on avait oublié, tant cela fait longtemps que leurs funérailles ont été chantées, leurs cendres dispersées aux quatre vents, emportés par le « TPS » ou le « Humanitarian parole ».

On a vu aussi quelques cryptos écrivains exprimer à haute voix leur jalousie contre l’écrivaine-ministre. Jean D’Amérique, pour ne pas le citer, un petit qui essaye de se faire un nom en France, n’a pas boudé son plaisir de critiquer, de commenter, pour rappeler aux uns et aux autres qu’il est encore vivant, après son passage catastrophique l’année dernière à la télévision française ou tout le monde a pu constater sa nullité, son manque de culture et de répartie.

S’il faut croire ces personnes, qui n’ont pas l’ombre d’une preuve, Emmelie Prophète ferait partie de ceux qui fournissent des armes aux gangs. C’est tellement fourre-tout, tellement absurde et insensé, qu’en regardant leurs divers commentaires on finit par ne plus savoir de quoi ils parlent ; sauf que l’on comprend qu’Emmelie Prophète est une tête qui dépasse. Et, en Haïti, on n’aime pas ça. Il faut absolument couper les têtes qui dépassent. Emmelie Prophète se trouverait à Paris, en Floride, à Santiago du Chili, qu’elle serait adulée par ce petit groupe, portée aux nues, comme quelqu’un qui a eu la bonne idée de partir et on l’inviterait de là où elle se trouve à commenter, avec la plus grande violence, ce qui se passe dans le pays. Plus c’est sanglant plus c’est beau et bon. La perception, de plus en plus, est que ceux qui habitent le pays sont forcément louches.

Les échos trahissent ces voix calomnieuses sur les médias sociaux. Ce qu’ils font  s’appelle littéralement « manger des personnes », « les dévorer » se repaitre de leurs chairs pour grossir, roter, péter, prendre plus de place physiquement sur la terre et sur les médias sociaux. La gloire sur les réseaux sociaux n’est qu’une mauvaise forme d’obésité, de celle qui met, pour toujours, à la merci d’une terrifiante pesanteur, empêche la circulation du flux sanguin et ruine jusqu’à la conscience.

Si la calomnie, l’outrage et l’outrance payaient, on saurait aujourd’hui comment ont été dépensés les fonds Petrocaribe après les mois d’esclandres et de déstabilisations provoquées par cette affaire. Si les discours incohérents, le « m’as-tu vu » comptaient en politique, on aurait une nouvelle génération de femmes et d’hommes politiques actuellement dans le pays. Nous en avons tellement besoin! Telles personnes n’auraient pas été gonfler la liste des anonymes qui circulent en Amérique et ne s’interrogeraient  constamment sur leurs sorts  s’il y a un changement soudain dans la politique d’immigration des États-Unis d’Amérique. Tel petit auteur souffreteux vendrait finalement des livres au milieu des mastodontes parisiens et français qui publient en France et n’aurait pas besoin de recourir à des stratagèmes pour ne pas se faire oublier.

Tuer Jovenel Moise n’a pas été suffisant – moun ki di men koulèv la se li ki touye l – il faut à chaque fois essayer. Surtout contre les gens qui ne répondront pas. Parce qu’ils jugent que ceux qui parlent le font avec des frustrations qui les concernent. Que c’est sans intérêt. Que leur répondre serait leur faire la faveur d’une visibilité qu’ils ne cherchent que trop. La vie de ceux qui parlent, postent, s’étouffent de paroles et de crachats est certainement plus dure que celle des gens dont ils parlent.

Les questions qui nous viennent sont celles-là : Pourquoi certains cherchent-ils systématiquement à punir ceux qui servent leur pays ? À quoi servent réellement ceux qui de, divers ailleurs, cherchent à détruire le travail de ceux qui osent demeurer sur place, travailler et espérer ? Peut-on faire un pays avec des murs de haine, en profitant de l’internet qui fonctionne bien, pour poster des balivernes ?

Les réponses sont sans doute celles-là : il y a dans tout cela une somme énorme de frustrations, un désespoir extraordinaire, une jalousie qui fait trembler les muscles, empêche de réfléchir.

C’est à mourir de rire quand on lit le commentaire le plus récurrent de certains sur le supposé « manque de compétences des autres » Comment évaluer ces « autres » si on n’est pas soi-même compétent ?  De tous ceux qui ont emboité, consciemment ou inconsciemment cette campagne, on ne connait aucun qui ait fait preuve de compétence dans un domaine ou dans un autre, qui ait eu un succès de librairie ou d’estime, contrairement à la ministre. Sinon la nouvelle n’est pas parvenue jusqu’à nous ou nous avons oublié. Plus on déroule le fil des publications, plus on comprend leurs motivations. La haine est le bien le mieux partagé en Haïti et dans la diaspora haïtienne. Et c’est cette même haine qui nous vaut la situation difficile que nous vivons. Ceux qui aboie ici et ailleurs sur les réseaux sociaux sont ceux-là même qui ont mis le pays à genoux avec le « peyi lok », qui dans un premier temps désignaient les membres des gangs, quand ils accomplissaient leurs basses œuvres, comme « pèp la »

À lire et à écouter les informations, il y a des moyens qui sont fournis à la Police haïtienne. Cette Police doit trouver comment affronter et neutraliser les gangs. La colère contre les catastrophes de Carrefour feuilles, de Lilavois, de Tabarre, entre autres, est légitime. Mais elles ne sont pas imputables à la ministre. Devait-on espérer que la ministre elle-même aille affronter les bandits sur le terrain ? Bien sûr que non ! il y a là un procès en sorcellerie.

En parlant de sorcellerie, nous savons qu’à travers le temps, et dans beaucoup de pays, on tuait les femmes accusées d’être des sorcières ; Il faut identifier également un anti féminisme primaire dans le bashing d’Emmelie Prophète. Avec en tête de file des soi-disant féministes. Dès qu’il y a une femme à abattre, les meilleurs snipers sont des femmes. Les féministes haïtiennes, nous l’avons compris, depuis très longtemps, n’ont d’autres causes qu’elles-mêmes. Elles n’ont aucun discours sur la question et ne feront jamais œuvre qui vaille. Le concept est absolument creux dans notre pays, les dernières à avoir porté une parole crédible sur la question étaient les membres de la Ligue Féminine d’Action Sociale. Nous étions en 1934.

Cette prise de parole, relativement longue, est surtout pour conseiller à ceux qui s’avilissent sur les médias sociaux en étalant leurs passions tristes de trouver une autre prise. Il est trop tard pour éliminer Emmelie Prophète. Il ne fallait pas lui laisser écrire et dire toutes ces choses avant de devenir ministre. Il fallait tout faire pour que le Premier Ministre ne fasse pas d’elle la première femme ministre de la justice de ce pays ; il fallait l’empêcher pendant l’automne 2022 de passer sur des médias importants en France pour parler d’Haïti. Il fallait l’empêcher, tout un été, d’être numéro 1 des ventes de livres dans toute la province du Québec et de prendre la parole plusieurs fois par semaine sur les médias canadiens. Il fallait. Il fallait. Il fallait.  Ce que vous écrivez sur vos murs ne resteront pas. La situation vous dépasse. Il faut demander plus à Emmelie Prophète, bien entendu, mais il ne faut pas appeler, comme vous le faites si joyeusement, à l’assassiner. On ne peut pas tout assassiner.

La Rédaction

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