Ce que certains ingénus, mal informés ou pas informés pourraient prendre pour de la « politique », de l’expression « démocratique », en observant ce qui se passe, ce qui se joue en République d’Haïti, n’est au final que des « drames familiaux ». La République d’Haïti est un miracle, par la façon dont elle a pris naissance et les divers tourments qu’elle a connu à travers le temps. Son histoire, souvent, semble se répéter en atrophiant les côtés obscurs et vénéneux de ses citoyens.
A bien regarder, ce sont à peu près les mêmes personnes qui animent la vie politique depuis une génération. Elles sont tantôt ensemble, tantôt en face les unes des autres. L’opposition qui se manifeste contre le Premier Ministre Ariel Henry – très inaudible et dispersée il faut le reconnaitre – n’est que ce qui reste de celle, farouche, envers Jovenel Moise, de sa prise de fonction en 2017 à son assassinat en 2021.
Le docteur Ariel Henry, aurait du être la « caution citadine » de Jovenel Moise, détesté il faut le reconnaitre, d’abord parce qu’il était vu comme un vulgaire paysan, laid, affublé d’une épouse qui faisait rigoler sur les médias sociaux tant elle portait avec inélégance les « chaussures de première dame ».
Dit ainsi cela peut paraitre brutal mais c’est la vérité et il faut que ce pays accepte de se dire la vérité de temps à autre, ne serait-ce que pour tenter de soigner les préjugés qui l’empêchent de progresser, définir la citoyenneté et penser l’égalité.
L’éminent médecin, avant d’être Premier ministre, nommé par Jovenel Moise, était bien vu et respecté par les cercles qui le combattent aujourd’hui. En 2004 il a été membre du Conseil des sages – ne cherchez pas à comprendre ce que c’est- après le coup d’état contre Jean-Bertrand Aristide dont Magali Comeau Denis, initiatrice de l’accord de Montana était l’un des porte-drapeaux. Lesly Voltaire, ministre d’Aristide en 2004 a rejoint, au nom de Fanmi Lavalas, la table des discussions de Montana en 2021 – à reculons il faut l’avouer – pour essayer de déloger le docteur Henry du pouvoir et proposer Fritz Jean, ancien Gouverneur de la Banque centrale, nommé par Aristide, et Steven Benoit, ancien beau-frère du Président Préval, « marasa » déchu d’Aristide, ancien premier ministre de ce dernier et deux fois président de la République.
Quant à Magali Comeau Denis, avant de mener la fronde contre Aristide en 2004, son époux, Hervé Denis, a été ministre de l’Information et de la coordination sous le Gouvernement Robert Malval, Premier Ministre d’Aristide, dans ce que l’on a appelé le gouvernement en exil, et à ensuite été choisi comme Premier ministre par ce même Aristide qui l’a fait tourner en bourrique. Il a renoncé à occuper le poste de Recteur de l’Université d’Etat pour être Premier ministre et au final Aristide ne lui a jamais donné le poste d’où l’acrimonie de son épouse contre Aristide en 2004.
il s’agit d’une série à rebondissement, plus ou moins médiocre, porté par des scénaristes farfelus, qui n’ont aucune peur du grotesque, comme « All my children ». Dans une saison qui sera tournée et diffusée peut-être en 2025, ou après, vous retrouverez les mêmes acteurs, ils auront vieilli, mais garderont intactes leurs vieilles rancunes, leurs besoins de dominer. Beaucoup auront changé de camp, mais dans le privé ils resteront comme une grande famille avec des égos extraordinaires. Malheureusement, 12 millions de personnes se trouvent piégées sur cette grande scène avec cette fratrie maléfique qui rivalise de coups bas réciproques en public et s’embrasse goulument en privé.
L’international a cru entrevoir une rupture en 2011 et a mis grossièrement la main dans les élections pour favoriser Michel Martelly; avec ce dernier l’exercice du pouvoir est devenu un grand bal de canailles, de ripoux et a marqué une «mulatrisation » de la vie publique que l’on n’avait pas vu depuis longtemps dans le pays.
Entre le 7 février 2017 et le 7 juillet 2021, Jovenel Moise a été assassiné chaque jour, jusqu’à l’acte final. Ce même international a compris ses erreurs en 2004 et en 2011 et laisse la famille s’entretuer gaiement devant l’évidence qu’une transition de 2 ans, comme en 2004 serait absurde, que le plébiscite organisé en petit comité, en faveur de Fritz Jean et de Steven Benoit, par le groupe de Montana est une farce de mauvais gout et en se disant, avec raison sans doute, qu’Ariel Henry est le mieux placé pour organiser les élections.
